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Heuristique & Sémiologique

 

Géographie et anarchie

Filed under: Invention,Webzette n° 8 — Author : — 4 Apr 2006 —

Géographie et Anarchie.

La géographie fut d’abord une cartographie. La terre était plane, elle avait des angles, des fins limitatives et une mer médiane. La géographie se devait de décrire, de représenter, de dessiner les côtes, de les jalonner de repères, de refuges, (voire de repaires). On ouvrait ainsi la route des découvertes, des conquêtes et du commerce. On traça bientôt les grands chemins continentaux, ceux des caravanes du négoce (sel, épices, soie,…), ceux des armées et l’on remonta les fleuves et les rivières. La montagne ? un obstacle ou un profil d’horizon ! Sur la terre arrondie la géographie fut requise pour ortho — graphier les frontières, zoner les pouvoirs locaux et les territoires conquis, planter des drapeaux et des panneaux douaniers, sous la grille cardinale des longitudes et des latitudes vues de Sirius ou de l’Etoile Polaire convoquées par les astronomes. Triangulation, projection… Outre l’orientation, la position relative implique la distance et sa mesure. Le temps pour joindre A à B mesura la distance AB, en précisant le moyen de déplacement : à pied, à cheval, en bateau,..(mais aussi à portée de mousquet ou de canon). Les “arpenteurs révolutionnaires” mesurèrent le quart du méridien terrestre pour définir le mètre alors que les jacobins découpaient la France en départements à l’aune du cavalier. Et l’hydrologie, la géologie,…La géographie n’est-elle qu’une géométrie descriptive, une topographie ? Certes non, cet investissement progressif de notre planète a favorisé la découverte des continents et de leur peuplement. Depuis Hérodote les récits de voyage sont nombreux qui s’intéressèrent aux paysages et aux coutumes des peuplades de ces contrées lointaines, quêtes d’exotisme. Il fallait aussi conquérir, convertir, civiliser. Ces relations d’aventures quoique empreintes de préjugés, d’arrières pensées, de fantasmagories ou de préoccupations littéraires ont accompagné et complété les relevés des géographes sans partager leur souci de rigueur et d’exactitude. A noter que les botanistes, les zoologistes, ces spécialistes de la classification se distinguèrent par la précision de leurs observations.

En ce 19 ème siècle, scientiste, technologique, colonial, évolutionniste, Elisée Reclus (1830-1905) savant géographe français, d’esprit libéral et généreux, rejette la géographie instrumentalisée par le Pouvoir, il s’intéresse aux hommes, aux sociétés et à la Terre, leur maison commune. Il prône et pratique une géographie vécue, de terrain (marche, alpinisme) il parcourt le monde à la rencontre des hommes, de leurs communautés et de leurs environnements, il découvre ainsi l’étroite et complexe interaction de l’Homme et de la Nature. Elisée Reclus donne à la géographie – science de l’espace- une dimension temporelle, humaine et sociale, il élargit sa “Géographie universelle de la Terre et de l’Homme” à l’anthropologie, à l’ethnologie, à l’écologie (anachronismes!!!). La Solidarité lui apparaît comme Cause, raison de l’Humanité, moteur de son progrès, déterminante pour son avenir. Il dit ne pas savoir s’il est anarchiste parce que géographe ou géographe parce que anarchiste!! Evolutionniste avec Darwin il s’en distingue préférant la notion de coopération à celle de sélection. Pour lui l’Evolution n’exclut pas la Révolution, il s’implique fortement dans l’Histoire Sociale et Politique de son temps, le coup d’état de décembre 1851 l’oblige à l’exil en Grande Bretagne et aux Amériques, il prend une part active à la Commune de Paris en 1871, arrêté il est condamné à la déportation en Nouvelle-Calédonie, grâce au soutien de la communauté scientifique sa peine est commuée en 10 ans de bannissement (Suisse et Belgique). Il n’est pas question de réduire son oeuvre (monumentale) à une formule mais on peut, en ces temps où le monde s’interroge sur la notion de Progrès, en retenir un précepte essentiellement reclusien : “……prendre définitivement conscience de notre humanité solidaire, faisant corps avec la planète elle -même, embrasser du regard nos origines, notre présent, notre but rapproché, notre idéal lointain, c’est en cela que consiste le progrès” (Elisée Reclus; “L’homme et la Terre”).

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